La biodiversité est à la mode. Pourtant la biodiversité n’est pas positive « en soi » pour les cultures. Il faut l’optimiser : choisir les espèces à implanter dans la culture ou dans ses environs, aménager l’espace local voire régional. C’est le but de la biodiversité fonctionnelle (Functional Agro-Biodiversity, FAB, in English).
ELN-FAB, réseau européen qui travaille ce sujet de façon concrète, a organisé un séminaire à Avignon regroupant 50 techniciens de 10 pays européens. Le séminaire a consisté en présentations sur des applications concrètes ou des sujets connexes (réseau biodiversité abeilles, rôle de la politique agricole commune, etc.) et en visite de parcelles en agroforesterie.
Quelques exemples d’applications concrètes en cours de développement et/ou partiellement opérationnelles :
Favoriser autour de la parcelle cultivée des plantes abritant préférentiellement des punaises prédatrices de mouches blanches ou d’acariens.
Base de données ELN-FAB listant plus de 100 espèces végétales abritant des prédateurs spécifiques ou des pollinisateurs.
Recherche sur l’incidence de l’aménagement paysager en vergers de pommiers.
Implantation de plantes hôtes pour accueillir des parasitoïdes contre la mineuse du citronnier.
« Agroforesterie » : implanter culture et arbres sur une même parcelle.
Les limites de la Biodiversité Fonctionnelle (FAB)
La plupart des approches de la FAB ne sont pas utilisables (encore) de façon standardisée, simple et fiable sur le terrain par l’ensemble des producteurs.
Concrètement, par exemple, implanter, à proximité d’une culture, des plantes qui vont attirer les prédateurs est séduisant et paraît évident. Mais encore faut-il (1) que ces prédateurs aillent sur la culture voisine se nourrir de parasites (2) que la plante en question n’attire pas plus des parasites que de prédateurs vers la culture… Ces points ne sont pas, en tous cas pas toujours, maîtrisés.
Autre problème qui devient préoccupant en Europe suite à la crise Escherichia coli (ECEH) de 2011 : les responsables qualité des distributeurs (Grandes Surfaces, etc.) exigent quelquefois, sous prétexte d’hygiène, de supprimer la biodiversité introduite par les producteurs pour des raisons agronomiques et environnementales…
En fruits et légumes, cela peut malheureusement contribuer à décourager les producteurs d’avancer vers la FAB. Voir par exemple « Comment la sécurité des aliments peut être une atteinte à l’environnement ».
L’agroforesterie est une pratique visiblement bien documentée et qui présente des atouts réels : productivité globale accrue (culture + arbres) avec des interactions positives entre arbres et culture (enracinement, eau, nutriments, régulation de la température). Cependant, cette technique est très pointue techniquement parlant et est éventuellement exigeante en main d’oeuvre. De plus, la production forestière est seulement à long terme. Mais surtout, il y a une interaction négative reconnue concernant la lumière. Cela ne pose pas de problème insurmontable dans le sud de l’Europe, mais est beaucoup plus problématique au nord, même si, dans le nord aussi, quelque producteurs s’y sont lancés…
Atouts et perspectives
Cependant, beaucoup des informations et réflexions venant des chercheurs, expérimentateurs et producteurs qui se lancent dans la FAB peuvent constituer des leçons agronomiques concrètes. Globalement, la perspective de la FAB est « stimulante » : elle implique de rentrer dans les détails des cycles de développement des plantes, de leurs parasites et des prédateurs, ainsi que de tous les éléments qui interagissent…
Dans les cas d’impasses techniques ou règlementaires pour protéger les cultures, les producteurs se montrent bien sûr plus sensibles aux arguments de ceux qui prônent la FAB. Il est clair que le problème essentiel des producteurs aujourd’hui est de trouver des solutions concrètes pour protéger leurs cultures. La FAB n’est pas « la » solution miracle. Mais elle est une méthode complémentaire utile dans certains cas.
Pour aller plus loin, visitez le site internet de ELN-FAB (principalement in English)
Plus de détails pour les membres sur demande.
Visite d'une parcelle en agroforesterie
Expérimentation de bande fleurie en maraîchage
Visite de l'insectarium de l'INRA d'Avignon
Présentation de la FAB par Felix Wackers, ELN-FAB