Sous le titre « Peut-on manger une pomme sans pépins ?« , le blog même pas mal d’AS Novel, lié au Monde, donne quelques informations intéressantes sur la filière pommes en France. Mais fait aussi étalage de clichés.
Du côté clichés :
Le bon vieux temps des pommes difformes :
AS Novel regrette que « la langue de Shakespeare envahit les rayons (…) Une pomme abîmée, bossue, et difforme rate de fait le casting des supermarchés (…) La distribution pourrait avoir un rôle à ce niveau ! » Pourtant, selon elle, « les petites pommes difformes et abîmées sont pour moi signe de qualités gustatives dignes de ce que je pouvais déguster petite dans le verger de mon arrière grand-père ou de ce que je trouve sur les marchés de producteurs bio… »
Confusion entre protection phytosanitaire et présence de résidus :
Reprenant le fait qu’il peut y avoir de l’ordre de 27 traitements dans un verger de pommiers (ce qui est vrai), AS Novel en déduit que la pomme est « sur la première marche du podium des fruits et légumes les plus chargés en pesticide ».
C’est oublier que :
– Traitement ne signifie pas toujours résidu. En l’occurrence, les pommes font partie des fruits et légumes contenant le moins de résidus.
– Les LMR (limites maximum de résidus) sont des limites agronomiques, définies bien en-dessous de tout risque alimentaire.
– Les traitements en question permettent de protéger les pommes de la tavelure, champignon parasite majeur et fortement dommageable, non seulement sur l’aspect mais aussi sur le goût. Les producteurs bios sont également amenés à lutter contre ce champignon, avec des produits certes considérés comme plus naturels, mais pas forcément plus innocents.
– En conventionnel comme en bio, les producteurs agissent avec bien d’autres moyens pour protéger leur verger et pour réduire le nombre de traitements : utilisation de variétés résistantes, broyage des feuilles à l’automne pour réduire la réinfestation au printemps suivant, méthodes alternatives, outils d’aide à la décision, etc. . Les traitements n’interviennent qu’en dernier recours. Avec des produits de plus en plus sûrs pour l’utilisateur et pour l’environnement.
Les échanges de denrées contraire aux saisons :
Pour AS Novel, il suffirait d’acheter local et il faudrait interdire le stockage en frigo pour réduire l’impact carbone.
AS Novel est-elle prête à n’avoir des pommes fraîches et croquantes que 2 à 3 mois dans l’année, des pommes ridées pendant 3 mois supplémentaires. Puis à attendre l’automne suivant ?
Du côté information :
Dans la première partie de son article, AS Novel détaille d’ailleurs un calendrier de toutes les variétés conventionnelles, loin des clichés développés ensuite…
Les grands volumes, les grandes régions de production, les différentes variétés et leur calendrier de consommation.
L’allusion aux 27 traitements au milieu de ce tableau est pour le moins incongrue. D’autant qu’il n’y a pas de conséquence en terme de résidu.
Toutes ces informations rendent le dossier « lisible »…
et montrent que l’on peut avoir envie de pommes modernes, croquantes, et produites par des professionnels dont AS Novel oublie de mentionner la technicité, le respect de l’environnement et la passion pour leur métier.
Retrouver, à l’occasion, de vieilles variétés est tout à fait louable. AS Novel veut se retrouver « petite dans le verger de [son] arrière grand-père ».
On a tous ce genre de nostalgie. On ne peut que la féliciter de la concrétiser sous cette forme. C’est un plaisir qui ne fait de tort à personne.
Mais il n’est pas raisonnable d’en faire un rêve d’agriculture…