Bonnes pratiques, Protection intégrée

« Produisons autrement », « agro-écologie » : une auberge espagnole ?

15 janv. 2013

Stéphane Le Foll a présenté son projet agro-écologique lors d’une journée « Produisons autrement » le 18 décembre 2012. Les commentaires dans les médias professionnels ont souligné la satisfaction des producteurs, heureux de constater que leurs actions combinant protection de l’environnement et productivité sont comprises. Au-delà de cette journée à visée médiatique, que peut-on attendre de l’agroécologie à la mode Le Foll ?

 

 

La journée « produisons autrement » organisé par le ministère de l’agriculture

Le Ministère de l’agriculture consacre une partie de son site à la journée et à la présentation de cette initiative par Stéphane Le Foll.

Présentation générale de la journée.
Présentation de son projet agro-écologique par Stéphane Le Foll.
Le projet détaillé d’agro-écologie.

 

Suite à la journée, le ministère a mis en ligne de nombreuses interviews vidéos de participants.
Voir en particulier :
Interview vidéo de Michel Griffon
, président de l’AEI (Agriculture Ecologiquement Intensive)
Interview de Marion Guillou
, ancienne DG de l’INRA

 

La journée « produisons autrement » dans les médias

De nombreux médias ont rendu compte de cette journée.

Pour La France Agricole, « Stéphane Le Foll veut faire de la France le leader européen de l’agroécologie »

Agri-Salon titre : « Stéphane Le Foll lance la trame de son projet « agro-écologique pour la France »  et conclut : « Reste que, s’il apparaît plutôt séduisant sur le papier, ce projet agro-écologique pour la France laisse, sur le terrain, quelques interrogations. Notamment, cette trame pourrait bien signer l’arrêt définitif du plan de stockage de l’eau, suite à la mise au placard par les Ddt des nombreux projets collectifs portés par des agriculteurs irriguants. Car la boîte à outils que proposera le ministère de l’Agriculture à travers les expériences existantes vise notamment à « réduire la quantité d’eau utilisée », et non pas à créer de nouvelles ressources. Pour les éleveurs, l’agro-écologie ressemble, pour l’heure, davantage à des complications environnementales, avec la définition de nouvelles normes en application de la directive nitrates actuellement en discussion entre Paris et Bruxelles. »

Le Nouvel Observateur ironise en titrant « Allons enfants de l’agro-écologie ! »:
« Pour l’heure, c’est une vision courageuse, un slogan qui sonne bien et surtout des missions et des rapports commandés notamment à Marion Guillou. Manifestement, Stéphane Le Foll a rodé ses arguments et a réussi à faire passer un souffle (…) Mais il y a un gros risque. Que dans le monde agricole très divisé, de plus en plus clivé entre intérêts divergents, chacun ait feint de trouver dans ce discours bien frappé ce qui l’arrangeait. »

Pleinchamp.com titre « Stéphane le Foll peaufine son plan «agroécologie » » et donne la parole à la FNSEA et à la Confédération Paysanne.

Sous le titre « Le Foll propose une transition écologique rapide à l’agriculture », Romandie.com détaille les différentes étapes exposées par le ministre.

 

« L’agro-écologie » : une auberge espagnole ?

La profession agricole a surtout retenu de la journée que des initiatives telles que l’AEI (Agriculture Ecologiquement Intensive), les Techniques Culturales Simplifiées (TCS), l’agroforesterie, … pourraient être inclues dans ce cadre de « l’agro-écologie ». Bref toutes les actions déjà développées par des groupes de producteurs ou en cours de développement.
En effet, toutes ces actions permettent d’atteindre le double but affiché : d’une part réduire les risques et préserver l’environnement, d’autre part au moins maintenir la productivité et la compétitivité de l’agriculture française.

Cependant, au vu du compte-rendu de la journée et à la lecture des documents, plusieurs écueils méritent vigilance :
– Le risque d’une couche supplémentaire de bureaucratie est réel : Les éleveurs s’en inquiètent particulièrement.
– En utilisant le terme de « produisons autrement », le ministre sous-entend (volontairement ?) que les agriculteurs sont aujourd’hui dans l’erreur. C’est faire fi des actions déjà menées par les producteurs.
Mais surtout, le flou du terme « agro-écologie » est susceptible d’engendrer des malentendus. Pour certaines organisations environnementalistes, parmi les plus radicales, l’agro-écologie signifie une agriculture quasiment en autarcie et refusant toute technique moderne. Nous avons déjà cité dans ForumPhyto l’exemple de la ferme « expérimentale » se réclamant de la philosophie de Pierre Rabhi : voir « L’agro-écologie, c’est quoi au juste ? (reportage de l’AFIS Ardèche) ».
L’agro-écologie est en quelque sorte une auberge espagnole où l’on trouve tout et son contraire.

 

Reste que, si Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture, s’appuie sur les actions concrètes mises en place par les producteurs et leurs organisations ou en cours de développement, il est possible de faire avancer sur cette base la compréhension par le grand public de ce qu’est réellement l’agriculture.