Anne-Isabelle Lacordaire, Responsable Recherche et Développement (macro-organismes-médiateurs chimiques-pollinisation) de Koppert nous a demandé d’apporter les précisions suivantes, que nous nous faisons un plaisir de publier.
AI Lacordaire a souhaité commenter ces deux articles publiés précédemment sur ForumPhyto :
– Hannetons et vers blancs : des producteurs démunis, un ministère… lent
– « Charançon rouge du palmier : l’impasse des solutions alternatives » (Agriculture et Environnement)
Son message :
Je souhaitais vous apporter quelques précisions sur l’utilisation des nématodes entomopathogènes pour lutter contre des ravageurs du gazon et des palmiers.
En effet, j’ai lu avec intérêt vos deux dernières newsletters qui évoquaient les problématiques Charançon rouge du palmier et Hannetons.
Ces ravageurs engendrent des dégâts d’une importance extrême et les stratégies de lutte sont difficiles à mettre en œuvre.
Toutefois, nous savons que c’est l’ensemble des moyens dont nous disposons qui permettra d’en limiter les populations. Les méthodes alternatives ou complémentaires à la lutte chimique en font partie. Parmi ces moyens complémentaires nous trouvons les nématodes qui appartiennent au groupe des macroorganismes et donc, ne sont pas soumis à l’homologation. En conséquence leur utilisation en est plus aisée. De nombreux professionnels et gestionnaires d’espaces verts de collectivités territoriales emploient régulièrement ces auxiliaires dans leurs stratégies de lutte.
De nombreux essais d’efficacité ont été réalisés pour mesurer l’impact positif que pouvait avoir ces auxiliaires sur les populations de divers ravageurs. Une synthèse bibliographique est jointe à mon courriel pour vous en donner un aperçu plus spécifique de leur utilisation sur gazon et palmiers.
Voir Synthèse bibliographique sur les nématodes entomopathogènes sur gazon et palmiers (Koppert, 2013)
Cependant, il sera important lors de leur application de prendre quelques précautions notamment en terme de climat.
Vis-à-vis du charançon rouge du palmier par exemple, Monsieur Santiago Uribarrena Bollain de la ville de Valence (Espagne) publie dans un article récent (de juillet 2013) de la revue Phytoma toute son expérience dans la mise en œuvre d’une protection biologique intégrée et son protocole d’intervention local.
Par ailleurs lors du colloque AFPP de janvier 2013 à Nice consacré aux ravageurs des palmiers, plusieurs communications scientifiques ont évoqué entre autres l’utilisation des nématodes pour lutter contre le charançon avec succès. Il est bien évident, que la gestion de ce ravageur est à établir en fonction de l’état sanitaire des végétaux et que des mesures curatives draconiennes comme l’abatage sont indispensables dans certains cas. Mais la prévention dans les zones de périmètre définies reste également une clé de la lutte (voir arrêté du 21 juillet 2010).
Concernant le hanneton, vous trouverez en pièce jointe une communication de Mireille Piron présentée en 2006 au colloque AFPP ZNA à Avignon. Elle y dépeint les différents résultats et essais d’efficacité et des études réalisés dans plusieurs pays.
Voir Efficacité des nématodes entomopathogènes sur gazon (présentation de Koppert au colloque AFPP de 2006)
Enfin, lors du prochain colloque AFPP ZNA des 15-16- et 17 octobre à Toulouse, une communication orale présentera comment « Réduire les IFT en gazon : performances des solutions biologiques et optimisation par les outils d’application. »
Pour terminer, je rajouterai que les moyens biologiques disponibles actuellement tels les nématodes répondent et apportent des solutions respectueuses de l’environnement, permettant ainsi de suivre les critères d’exigence du plan interministériel. Ceci afin d’améliorer la qualité de l’eau pour favoriser une utilisation durable des produits phytosanitaires et réduire ainsi les IFT. L’IFT est utilisé dans le cadre du réseau DEPHY Ecophyto lancé en 2010.
Nos remarques
Concernant le charançon rouge du palmier, l’article de ForumPhyto était une reprise d’Agriculture et Environnement. La piste Beauveria Bassiana était, dans cet article, jugée insuffisante.
Les nématodes entomopathogènes peuvent contribuer à protéger les palmiers de ce ravageur.
Le but de notre article, comme celui d’Agriculture et Environnement était surtout de souligner que l’idéologie du ministère de l’agriculture obnubilé par l’esprit du Grenelle, l’empêche d’homologuer une solution « chimique », efficace, approuvée par l’ANSES et adoptée d’ans d’autres pays européens.
Concernant le hanneton, l’article de ForumPhyto était basé sur une note ministérielle dans le cadre d’Ecophyto. Pour l’essentiel, nous y regrettions que Beauveria Bassiana, une solution biologique reconnue efficace par la note elle-même, adoptée par d’autres pays de l’UE, en « expérimentation » depuis 5 ans en France, ne soit toujours pas autorisée.
Vu les informations apportées par AI Lacordaire, nous pouvons rajouter qu’il est malheureux que cette note ministérielle ne mentionne que très succinctement la possibilité d’utiliser des nématodes entomopathogènes, qui, de plus, ne nécessitent pas d’homologation.
Globalement, les exigences d’efficacité sont souvent assez importantes en fruits et légumes, ce qui peut nécessiter l’emploi de méthodes chimiques. Cependant les producteurs sont attentifs à employer des méthodes ayant le moins d’impact possible sur l’environnement. Les moyens biologiques tels que les nématodes entomopathogènes sont de ceux-là. Mais, c’est bien l’agencement de l’ensemble des méthodes – préventives, agronomiques, conventionnelles, alternatives, biologiques – qui permet d’optimiser l’efficacité tout en réduisant l’impact environnemental.
Pour aller plus loin :
Efficacité des nématodes entomopathogènes sur gazon (présentation de Koppert au colloque AFPP de 2006)
Synthèse bibliographique sur les nématodes entomopathogènes sur gazon et palmiers (Koppert, 2013)