Sur proposition de Joël Labbé, sénateur du Morbihan, le Sénat a adopté en première lecture une petite loi visant à mieux encadrer l’utilisation des produits phytosanitaires.
En fait, cette loi vise essentiellement à interdire l’usage de tous les pesticides à l’horizon 2020 pour les personnes publiques et à 2022 pour les particuliers, « afin de laisser le temps, aux personnes publiques comme aux industriels, de préparer la transition vers l’utilisation de produits alternatifs. »
Un troisième volet de cette loi consiste à lever les freins réglementaires à l’autorisation des « préparations naturelles peu préoccupantes » (alias PNPP). Marie-Christine Blandin, sénatrice écologiste, y voit la solution pour les jardiniers « Il en va de la qualité du travail des jardiniers. Ils ne vont pas y aller avec une pince à épiler ! ». Il n’est cependant pas sûr que les PNPP soient une solution toujours suffisante pour secourir les jardiniers des classes populaires pour lesquels le jardin est une source alimentaire d’appoint importante.
Générations Futures, ONG anti-pesticides par principe, félicite Joël Labbé, pour cette « réelle avancée dans la prise de conscience de la nécessité de réduire l’exposition du public et des travailleurs aux pesticides », tout en regrettant les délais trop longs de mise en application et les dérogations pour les produits à faible risque.
Mais la réalité ne se laisse pas facilement dompter…
Par cette loi, les sénateurs écologistes affichent leur volonté que « le zéro phyto devienne une règle culturelle ».
Mais le projet de loi contient déjà des dispositions qui montrent qu’il n’est pas si simple de plier la réalité à la loi… Non seulement le délai d’entrée en application est fixé à échelle relativement lointaine, mais :
– Les voies ferrées, les pistes d’aéroport, les terrains de sport et les cimetières sont exclus du dispositif.
– Les espaces privés fréquentés par du public (Par exemple les parcs d’attraction) sont également exclus du dispositif
– Une dérogation à l’interdiction est prévue en cas de propagation d’organismes nuisibles et en cas de danger sanitaire
Il n’en reste pas moins que, pour Joël Labbé, sénateur initiateur de cette proposition, la perspective est à l’élargissement de l’interdiction : Il voit cette loi comme « un coin que l’on met dans la montagne des pesticides. Ils n’en sortiront pas indemnes, car c’est signifier que ce qui est mauvais pour les jardins, c’est aussi mauvais pour les champs. »
Bref, en adoptant cette loi en première lecture, les sénateurs n’ont vu que les risques, jamais les bénéfices des produits phytos, et que l’interdiction pour minimiser les risques, jamais l’information ni la responsabilisation des utilisateurs. On ne peut pas faire plus contreproductif.
Sale temps pour les laitues et les platebandes. Et les vrais jardiniers n’auront-ils bientôt plus le choix qu’entre les mauvaises herbes, le béton ou le mal de dos ?
Quelques autres articles sur le même sujet :
Vedura.fr, Actu-Environnement, Le Figaro.
Pour aller plus loin, lire :
Sous le titre « Une loi pour interdire les pesticides aux particuliers et aux collectivités » (accès restreint), Le Journal de l’Environnement fait une analyse détaillée de la discussion du texte au Sénat.
La loi telle qu’adoptée en première lecture par le Sénat.
Résumé de la discussion au Sénat.