Sous ce titre (mais sans point d’interrogation), Terraeco.net, comme d’autres sites environnementalistes, fait découvrir un véritable manuel d’agronomie de 1845, destiné aux maraîchers. Intéressant, mais peut-être pas aussi « renversant » que cela.
Des techniques intelligentes, avec les connaissances de l’époque
Toutes les questions qui se posent à un maraîcher de cette époque sont évoquées : Le foncier, la main d’œuvre, les diverses cultures pratiquées, l’enrichissement du sol, le binage…
Un exemple de technique élaborée à partir des connaissances du XIX° siècle : la « couche chaude » utilise la chaleur du fumier se décomposant. Cela fonctionne bien, à condition de mettre « beaucoup » de fumier : plusieurs cm, voire dizaines de cm, d’épaisseur… C’est aujourd’hui envisageable dans un jardin amateur ayant une source importante de fumure organique.
Pour réchauffer les semis ou les jeunes plantations, on utilise aujourd’hui l’effet de serre d’une couverture plastique (serre, tunnel ou micro-tunnel), beaucoup moins polluant si on recycle le matériau correctement.
Pourquoi ne peut-on pas en faire un modèle ?
Au XIX° siècle, la fertilisation est essentiellement à base de matière organique employée massivement ; Y compris des excréments humains même si ce n’est pas dit explicitement…
Le manuel indique que l’on n’emploie pas « beaucoup » d’engrais (A l’époque, le mot engrais veut dire « fumier de vache » ou « fumier de cheval », ndlr). Il faut toutefois avoir clairement conscience que peu de fumure au XIX° siècle pour un maraîcher serait certainement beaucoup plus que les normes actuelles !!
Au regard des critères actuels, la main d’œuvre nombreuse est surexploitée, y compris les enfants. Pp 7-8 : « pour cultiver un jardin de 1 hectare il faut, en tout temps, un personnel de cinq à six personnes, composé du maître et de la maîtresse, une fille à gages, un garçon à gages s’il y a des enfants en état de travailler ou, à leur défaut, deux garçons à gages et souvent un ou deux hommes à la journée. »
Concernant la protection phytosanitaire, le guide ne mentionne que le désherbage… manuel et pénible !
Page 80 : « ésherber, c’est arracher à la main les mauvaises herbes qui croissent parmi les bonnes (…) ce sont toujours les femmes et les enfants qui ésherbent et sarclent »
P 87, sur le travail des femmes : « si leur part dans un marais (le marais est le champ cultivé par un maraîcher, ndlr) semble moins pénible que celle des hommes, elle est peut-être bien moins saine ; car les femmes sont, par leurs travaux, une partie de la journée, à genoux ou à moitié couchées sur la terre souvent humide, et il en résulte fréquemment pour elles des fraîcheurs plus ou moins douloureuses »
Sans parler des maladies et parasites des plantes qui, à un moment ou à l’autre, apparaissent. Seules solutions : Les ramasser à la main ou sacrifier de la production.
Pour Terraeco.net, pas de doute, « ce livre nous apprend énormément, et nous prouve qu’une autre agriculture est possible et ce depuis longtemps ».
La sphère de l’agriculture alternative bruisse régulièrement d’allégations sur la possibilité d’avoir une agriculture productive sans la « chimie », toujours supposée dangereuse. Bien sûr, c’est intéressant pour les jardiniers amateurs. C’est surtout intéressant historiquement. Nos ancêtres maraîchers étaient intelligents et utilisaient au mieux les techniques dont ils pouvaient disposer. Revenir à ce temps-là serait-il un progrès économique, environnemental et social ? Rien n’est moins sûr.
Pour aller plus loin :
Le manuel pratique de la culture maraîchère de 1845, version intégrale numérisée, soit par Google, soit par Gallica