La version officielle sur l’incident survenu en mai en Gironde dans une école est tombée : Selon la DRAAF Aquitaine, citée dans cet article de La Vigne mag « Il n’est pas possible d’attribuer à l’un ou à l’autre des deux programmes la responsabilité exclusive des symptômes. Il n’est d’ailleurs pas formellement attesté un lien de causalité entre les symptômes observés et le phénomène en cause. (…) Il n’y a que des suspicions qui reposent sur le fait que les symptômes décrits sont compatibles avec les phrases de risques rattachées aux produits utilisés en terme de risque d’irritation cutanée et oculaire. Dans ce cas, les deux programmes sont logés à la même enseigne ». La Vigne mag souligne d’ailleurs que « Autant le traitement bio que le conventionnel étaient susceptibles de provoquer les symptômes observés chez les enfants. Le soufre est en effet irritant pour la peau et les yeux. L’Éperon peut provoquer des allergies et le Pepper des irritations de la peau. »
Cette prudence des autorités est compréhensible. Cependant elle alimente de fait la dérive hystérique de nombreux médias et des ONG anti-pesticides qui se saisissent de cet incident pour attaquer les « pesticides ».
Ces derniers oublient de préciser plusieurs points :
– Si l’on ne peut pas être absolument certain de l’origine des symptômes, il reste néanmoins très probable que c’est bien le soufre appliqué dans la parcelle bio qui est à l’origine des malaises. Si Générations Futures était honnête, il devrait demander l’interdiction de tous les pesticides, bios comme conventionnels, autour des écoles…
– La question de fond est qu’à moins de ne pas produire de vin, il FAUT protéger la vigne contre le mildiou et l’oïdium. Pour cela, il n’y a pas d’autres moyens aujourd’hui que des produits, biologiques ou conventionnels, qui présentent un risque s’ils sont mal utilisés.
– Même s’ils sont parfois contraints, malgré la législation, de traiter quand il y a du vent, les viticulteurs peuvent pratiquement annuler ce risque pour la santé par des mesures simples : éviter certaines heures, éviter au maximum la dérive, par exemple en s’équipant en pulvérisation confinée (voir ici, en fin d’article, sur ForumPhyto).
Bien que nuancé dans le premier exposé des faits et des positions des parties prenantes, l’article du Monde, sous le titre « Omerta sur les pesticides dans le vignoble bordelais », est tout à fait significatif de cette dérive sensationnaliste. Une bonne partie de l’article est consacrée à mettre en valeur la position de militants pour qui il y a une « omerta » concernant les pesticides, oscillant « entre le déni et le fatalisme. » Militants qui participent par ailleurs aux actions de Générations Futures : analyse des cheveux des enfants pour détecter des pesticides (voir ici sur ForumPhyto) et pétition « demandant l’interdiction de pulvériser des pesticides le long des habitations et des écoles, partout en France ».
L’outrance des réactions contre les méchants pesticides, forcément synthétiques est quasi-générale dans les médias, particulièrement de sensibilité environnementaliste. Par exemple, la lecture de cet article d’Actu-Environnement, et surtout des réactions de certains lecteurs laisse pantois.
Il y a bien une omerta. Mais pas une omerta sur les pesticides.
Dans la presse et les médias environnementalistes, il y a une omerta sur les pesticides bios. Tous évitent soigneusement d’associer les mots « pesticides » et « bios ». Tous crient haro sur les pesticides… sous-entendu synthétiques.
Pourtant c’est bien probablement du soufre autorisé en bio qui est en cause dans l’incident de Gironde. Pourtant le cuivre utilisé massivement en bio voit son utilisation déjà limitée du fait de ses impacts négatifs sur les vers de terre, et autres effets environnementaux indésirables. Pourtant l’huile de neem revendiquée par les producteurs bios est un perturbateur endocrinien suspecté.
Il ne s’agit aucunement ici d’accuser les pesticides bios. Comme les pesticides conventionnels, ils ont leur utilité. Les agriculteurs bios, comme les conventionnels, préfèrent de loin les méthodes préventives à l’utilisation de produits coûteux et risqués par définition. Mais, en bio comme en conventionnel, les agriculteurs peuvent être amenés à utiliser des pesticides. Les pesticides sont une partie de la boîte à outils nécessaires pour protéger les plantes. En bio comme en conventionnel, il faut les utiliser prudemment selon les bonnes pratiques.
En Gironde, lors de cet incident, ni les pesticides bios, ni les conventionnels n’étaient à incriminer. Seules les pratiques de pulvérisation étaient à condamner.