Agrican (Agriculture et Cancer) est un vaste programme d’épidémiologie portant sur 180 000 personnes travaillant ou ayant travaillé dans l’agriculture. En juin 2011, les premières conclusions étaient que la mortalité par cancer des travailleurs de l’agriculture était plus faible que pour le reste de la population.
En octobre 2014, Pierre Lebailly, coordinateur du programme Agrican, en a présenté un nouveau point d’étape lors d’un colloque organisé par l’ANSES et l’EFSA (Agences, respectivement française et européenne, de sécurité sanitaire). Les résultats portaient cette fois sur l’incidence des cancers et ils sont clairs : la population agricole est moins victime de cancer que le reste de la population. Et cette différence est « significative ».Ceci est une bonne nouvelle qui, de plus, conforte les résultats publiés en 2011.
Beaucoup d’observateurs sont obnubilés par les maladies, en particulier les cancers, qui pourraient être causées par les pesticides. Certes les pesticides sont intrinsèquement dangereux. Ils peuvent causer des intoxications en cas de mésusage. Il a été démontré que, si le travailleur est insuffisamment protégé, certains pesticides pouvaient provoquer des maladies sur le long terme : par exemple maladie de Parkinson ou certains cancers particuliers.
Mais, sans vouloir sous-estimer ces questions, l’étude Agrican montre clairement que les pesticides ne sont pas la catastrophe sanitaire annoncée par les marchands de peur.
Certes des comportements doivent encore changer. Il faut veiller à ce que les personnes qui manipulent les produits phytosanitaires et effectuent les traitements aient conscience du risque pris et puissent se protéger suffisamment : par exemple gants, lunettes, comportement et lavage des mains après traitement.
Certes il y a des différences entre secteurs de l’agriculture dont il n’est pas facile d’identifier les causes. Bien d’autres facteurs peuvent être à l’origine de cancers ou d’autres maladies chroniques : poussières, gasoil, virus animaux, moisissures, etc. La deuxième phase du programme Agrican permettra de commencer à mieux cerner les facteurs responsables.
Manipulation catastrophiste par certains médias
Suite à la communication publique de ces résultats, certains médias se sont d’abord demandé pourquoi les types de cancer varient en fonction des cultures, « ce qui pourrait être lié à l’utilisation de pesticides. » Mais n’ont rien, absolument rien, dit de l’incidence significativement plus faible des cancers chez les agriculteurs… Voir par exemple : Pourquoi Docteur.
Sous le titre « Pesticides : flagrant délit de prise d’otage de l’opinion », Alerte-Environnement a d’ailleurs mis en évidence ce mécanisme : « Évidemment, dans un contexte politique, militant (ONG) et médiatique qui ne cesse de mettre l’agriculture et les pesticides sur le banc des accusés, ces résultats sont inacceptables. Il faut donc les triturer dans tous les sens pour obtenir un titre choc ».
Sous le titre « Etude AGRICAN : « Les travailleurs agricoles se portent mieux que le reste de la population », le CSLFLF (Collectif Sauvons les Fruits et Légumes de France) s’insurge. : « Il est irresponsable que certains observateurs s’emploient, volontairement ou non, à interpréter de manière mensongère les premiers résultats de l’étude en alimentant des peurs. »
Le CSLFLF conclut : « La santé des agriculteurs vaut plus que des slogans et formules conçues pour trouver un écho médiatique à des marchands de peur qui cherchent à imposer comme une vérité scientifique ce que la science elle-même ne peut démontrer, c’est-à-dire le lien entre l’exposition aux pesticides et le risque de cancer. Laissons les chercheurs travailler. Respectons-les. »
Nous ne pouvons qu’approuver
Pour aller plus loin:
« Pesticides et cancer : rien de probant ! (Etude Agrican) » (2014)
« Etude Agrican : agriculture et cancer » (septembre 2011)