Dans un tweet, Michèle Delaunay, députée de la Gironde, a avancé qu’un ouvrier viticole qui ne boit pas, qui ne fume pas, peut avoir un cancer dû au soleil. Les produits de traitement de la vigne « ne sont plus cancérigènes », soutient-elle.
Elle s’est attirée les foudres de No wine is innocent, un blog hébergé par le Nouvel Observateur, qui pousse son coup de gueule en titrant « Alors comme ça, les pesticides « ne sont plus cancérigènes » ? » : « Au-delà de ce diagnostic étonnant, c’est le déni du caractère cancérigène des pesticides qui surprend le plus dans cette affirmation de Michèle Delaunay ». No wine is innocent s’appuie d’une part sur le témoignage d’une militante anti-pesticide dont le frère employé viticole est décédé d’un cancer et, d’autre part, sur une étude connue de l’Inserm.
La sphère environnementaliste a emboîté le pas et crié au scandale de « déni ». Exemple sur Les Brinsdherbe Engagés.
Mais l’affirmation de Michèle Delaunay est-elle « surprenante » pour autant ? Est-elle fausse ?
Sous le titre « Michèle Delaunay prise à partie par les twittos anti-pesticides », Anne Chaput sur Rue89Bordeaux livre une analyse moins lapidaire que les dialogues en 140 caractères de Twitter et permet à Michèle Delaunay de s’expliquer plus en profondeur.
Le fond de son argumentation : « Il faut noter que le mot “pesticides” est devenu un vrai fourre-tout. Je n’aurais peut-être pas dû dire qu’ils ne sont plus cancérigènes, mais que ce sont des cancérigènes faibles et incertains, depuis que l’arsenic a été interdit en 2001. Ce qui m’agace, c’est que les écolos montent en mayonnaise la question des pesticides mais ne disent rien sur le tabac dont il est prouvé qu’il est le facteur n°1 de risque de cancer évitable, devant l’alimentation, l’alcool et le soleil, et loin, très loin devant les facteurs environnementaux qui incluent pollution et pesticides. Le tabac cause 44 000 décès par an et son coût social est estimé à 47 milliards d’euros par an : c’est trois fois le déficit de la sécurité sociale ! »
L’article mentionne également l’étude Agrican, vaste étude épidémiologique sur le lien possible entre pesticides et cancer : « Ses résultats complets ne seront connus qu’à partir de 2017, mais ses premières conclusions faisaient état, en 2011, d’une meilleure longévité et d’un risque plus faible de décéder d’un cancer chez les agriculteurs que dans le reste de la population ». Pour plus de détails, voir ici sur ForumPhyto.
Personne ne nie que les pesticides peuvent être dangereux lorsqu’ils sont mal utilisés et/ou lorsque l’applicateur se protège insuffisamment.
Mais, comme le rappelle Michèle Delaunay, il faut nuancer et même fortement nuancer. Les pesticides ne sont pas les tueurs massifs souvent décrits. Bien d’autres risques sont malheureusement passés sous silence.
Il faut de plus rappeler que les pesticides ont un rôle positif en assurant la protection contre des « pestes », fortement nuisibles. Ils sont donc utiles à la santé des plantes et souvent aussi à la santé humaine. A condition bien sûr de les utiliser avec discernement. Aussi peu que possible. Aussi souvent que nécessaire.