L’émission Envoyé Spécial de France 2 du 5 mars 2015 attaquant les pommes suscite de nouveaux commentaires.
L’AFIS (Association Française pour l’Information Scientifique) des Bouches-du-Rhône a publié « Culture et conservation des pommes : quand on prend les téléspectateurs pour des poires ». Bien documenté et avec des références scientifiques sérieuses, les auteurs de l’article démontent méticuleusement « l’opération d’intoxication médiatique » d’Envoyé Spécial. Ils expliquent les pratiques des producteurs et les faits qui démentent les affirmations sans fondement. Ils expliquent aussi les manipulations auxquelles s’est livré Envoyé Spécial : commentaires lourds de sous-entendus non démontrés, scènes filmées et coupées au montage, pseudo-cautions scientifiques, interview de François Veillerette, présenté comme un expert, mais dont l’émission omet de préciser qu’il est avant tout un écologiste politique.
Extraits de l’article de l’AFIS : « Le téléspectateur est victime d’une manipulation savamment organisée. En studio, les enregistrements ont visiblement été retravaillés pour déformer l’information quitte à faire passer certains mensonges.(…) Cette affaire démontre une nouvelle fois que le consommateur doit se méfier de tout reportage traitant de la santé et de l’environnement qui n’est pas suivi d’un débat contradictoire. Sans ce débat, personne ne peut être sûr qu’il ne sera pas victime d’une manipulation »
Quant à Julie Martin, journaliste au magazine professionnel Végétable, sous le titre « Pourquoi tant de haine ? », elle démonte surtout la façon dont les journalistes d’Envoyé Spécial ont délibérément leurs interlocuteurs professionnels, y compris elle-même. Elle analyse aussi la mécanique médiatique : « Il faut savoir que certains journalistes écrivent leur sujet avant de le tourner (synopsis) et que l’enquête est parfois terminée dans leur bureau avant qu’ils mettent le pied sur le terrain. S’ils vendent, ils tournent… Ils sont soumis à la loi du marché et de l’audimat : se vendre à tout prix. » Elle soutient l’initiative de l’ANPP (Association Nationale des Producteurs de Pommes et de Poires) de demander un droit de réponse à diffuser dans Envoyé Spécial.
Malheureusement, l’habitude des médias de se servir des peurs alimentaires pour attirer le public semble être bien ancrée. Par exemple, France 5 a fait une émission similaire avec trois aliments cibles : La pomme du Limousin (de nouveau…), le saumon, et la salade en Bretagne. Comme pour l’émission de France 2, la seule utilisation de pesticides est condamnée sans appel, par des experts qui n’en ont que le nom ; Et, ce, quelles que soient les modalités de traitement, les produits utilisés, ou le niveau de résidus.
Ce que la profession accepte mal dans de tels cas, ce n’est pas la critique. C’est, par le choix des images, le montage, les pseudo-experts et les commentaires, une vision unilatérale transmise au spectateur.
Les critiques sont légitimes. Et il y a, bien sûr, toujours des comportements à condamner et des améliorations à apporter. Mais ces émissions, alors qu’elles se présentent comme des enquêtes sérieuses, relèvent au contraire, par leur discours unilatéral et caricatural, de la télévision-poubelle, au même niveau que les pires émissions de télé-réalité.