La question des résidus de médicaments dans les eaux fait rarement les titres des médias et réseaux sociaux, en particulier environnementalistes. Quel est l’importance de cette pollution ? Comment les risques sont-ils évalués ? Le point de la situation
Une question peu étudiée
On trouve des articles mentionnant la pollution de l’eau par les médicaments. La plupart du temps de façon alarmiste, en en soulignant l’ubiquité (on en retrouve partout…), mais pratiquement sans jamais indiquer les concentrations en cause.
Lire par exemple « Quels sont les nouveaux polluants détectés dans les rivières ? » (Sciences et Avenir)
En comparaison avec la pollution par les pesticides, qui fait l’objet d’une abondante littérature scientifique, réglementaire et politique, la pollution par les médicaments ne semble pas être une priorité des pouvoirs publics. Une recherche Internet fait mention de quelques documents officiels entre 2008 et 2011.
Par exemple :
Rapport de l’ANSES de 2010 sur l’évaluation de l’exposition humaine, ou
Document de l’ANSES de 2008 sur la hiérarchisation des résidus de médicaments pour l’analyse des ressources.
Il est à noter que, si l’impact sur l’environnement est quelquefois mentionné, les seuls développements concernent l’exposition humaine. Et encore ! : le plus souvent sans évaluation de risque…
Quelques liens intéressants
Malgré tout, quelques articles plus récents sont plus prolixes, au moins sur les causes de la pollution et les moyens principaux à mettre en œuvre pour réduire les résidus et les risques.
« Quand les médicaments polluent notre eau… » (pdf 1MO, mars 2013) est un document assez complet, rédigé par l’ASEF[1]. De plus, il est le seul, à notre connaissance à parler concentration et évaluation des risques environnementaux, via le rapport « PEC/PNEC » (concentration prévisible/concentration sans risque. Pour en savoir plus voir ici). Le rapport PEC/PNEC est la méthode préconisée par l’Agence Européenne du Médicament (EMEA). Cette méthode est utilisée dans le cadre de l’autorisation des nouveaux médicaments. Mais on manque souvent de données scientifiques pour les médicament anciens.
« Inspiration : médicaments dans l’eau des rivières » (octobre 2014, Noémie, blog d’artiste). Sa profession n’en fait évidemment pas une personne compétente mais son questions/réponses et les liens qu’elle fournit sont intéressants.
« 7 choses à savoir sur la présence de médicaments dans l’eau » (aout 2014, Sciences et Avenir)
Les principaux faits à retenir :
– Plus de la moitié des médicaments non utilisés sont actuellement directement rejetés dans l’environnement.
– On retrouve des résidus de médicaments partout, à des doses très faibles
– Le risque toxicologique direct sur les humains est très probablement négligeable dans tous les cas.
– Cependant, le risque lié à certains médicaments mériterait évaluation écotoxicologique et/ou mesures correctives. C’est en particulier le cas des pilules contraceptives et des médicaments anti-cancéreux qui ont un fort pouvoir de perturbation endocrinienne.
– Les données toxicologiques et surtout écotoxicologiques concernant les résidus de médicaments dans l’eau manquent drastiquement.
Notre conclusion
En matière d’impact des traitements phytosanitaires sur l’environnement, la réglementation et les pratiques des producteurs ont fait d’importants progrès depuis plus de 30 ans : nature des substances employées, méthodes d’application, récupération des EVPP et PPNU[2], etc.). Des progrès sont toujours en cours.
En matière de médicaments, c’est plutôt la préhistoire. Sans dramatiser la situation, des actions sont nécessaires. A commencer par ne pas jeter les médicaments usagés (poubelle, lavabo, toilettes), mais les rapporter dans une pharmacie !
[1] Association Santé Environnement France, association de médecins, plutôt environnementaliste, mais moins systématiquement alarmiste et militante (à ne pas confondre avec Réseau Environnement Santé)
[2] Emballages Vides de Produits Phytosanitaires et Produits Phytosanitaires Non Utilisés
Pour aller plus loin:
Dossier de liens établi en 2010 par Bruno Peiffer sur les médicaments dans l’eau