« Pas touche à mon cuivre ! » Tel pourrait être le mot d’ordre de la filière bio lancée à l’Union Européenne. Pourquoi ? Quel sont les enjeux ?
Le règlement 2015/408 de l’Union Européenne établit une « liste des substances dont on envisage la substitution. » Ceci a pour implication que s’il existe des moyens alternatifs aussi efficaces et moins risqués, les autorités nationales peuvent envisager d’en interdire l’usage. Le principe est louable, même si d’une part il implique la mise en place d’une véritable usine à gaz pour instruire les dossiers, et d’autre part il peut être interprété de façon abusive et inadéquate.
Il est démontré scientifiquement que le cuivre, s’il est utilisé fréquemment et à dose élevée, s’accumule dans les sols et est dommageable à la vie du sol, voire plus.
Donc l’UE a décidé de classer le cuivre parmi les « substances persistantes et toxiques » et de le mettre dans cette fameuse liste.
Mais pouvoir continuer à utiliser le cuivre est, pour l’agriculture bio, un enjeu de taille : c’est le fongicide de référence, indispensable dans certains cultures particulièrement sensibles aux champignons : pommes de terre et vigne en particulier.
Donc la filière bio, via « l’European Union Copper Task Force » qui regroupe les principales firmes fournissant le marché, craignant que ceci ne mène à l’interdiction à terme du cuivre, a introduit un recours juridique auprès de l’UE. Dans ce recours, elle déclare entre autres : « les critères de persistance, bioaccumulation et toxicité (ci-après les «critères PBT»), et particulièrement la persistance, ne sont pas appropriés pour le cuivre. »
Commentant ironiquement ce recours Alerte Environnement titre « Le lobby du bio chercherait-il à contourner la réglementation européenne ? »
Nous ne serons peut-être pas aussi sévère, mais il est clair que les pesticides bio sont des pesticides. Il est donc normal qu’ils soient réglementés comme tels. De plus, pour le cuivre comme pour les autres substances « dont on envisage la substitution », ils ne seraient interdits QUE si l’on trouve une solution alternative agronomiquement au moins aussi bonne. Toutes ces substances sont autorisées. Moyennant le respect des bonnes pratiques (et de la réglementation), elles ne posent pas de problème particulier. Pour le cuivre, il s’agit essentiellement d’avoir une fréquence et une dose appropriée.
Actualisation au 12 octobre :
Olivier Masbou, reprend cette question dans son Blog-notes (voir ici). Il conclut : « Tout cela doit donc faire l’objet d’âpres débats. Mais ce qui nous amuse, si vous me permettez l’expression, c’est que la filière bio va devoir, enfin, affronter la vérité en face : un produit bio n’est pas un produit non traité, c’est un produit traité différemment. Il était temps !«