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Le bio, « c’est accepter le gaspillage des ressources et de la nourriture », surtout en 2016

20 sept. 2016

Dans une grande partie de l’Europe occidentale, le climat de l’année 2016 a été catastrophique pour de nombreuses cultures. C’est au point que les producteurs bios de céréales, de pommes de terre ou de vin, ont eu une récolte proche de zéro. Les productions conventionnelles ont également souffert, mais elles ont limité les dégâts.

Dans Contrepoints, sous le titre « Le gaspillage alimentaire bio, ça suffit ! », Wackes Seppi fait part de ce débat et de ses conséquences en Allemagne.

Le parti vert (Die Grünen) dénonce vivement le gaspillage alimentaire. Il demande que « la politique, le commerce et les producteurs [soient] « mis en demeure » de mettre fin au gaspillage des produits et des ressources ».

Cependant, Wackes Seppi note à juste titre que « On assiste dans la République fédérale, cette année, au plus grand gaspillage de nourriture et de ressources […]
De quoi s’agit-il ? Les adeptes d’un mouvement de renouveau […] expliquent à leurs disciples qu’il est préférable de ne rien récolter plutôt que de pécher par une transgression de la nature. Selon les politiciens qui sont proches de ces idées, ce comportement ne devrait pas seulement être toléré, mais être rendu obligatoire à l’échelle nationale : « cultivez sans récolte », telle est la devise, protégés par des subventions qui permettent aux disciples du « mouvement » de détruire de la nourriture, sans qu’ils mettent leur existence économique en jeu.
Les lecteurs attentifs auront deviné : il est question de l’agriculture biologique. Cette année, elle a subi des pertes de récoltes extrêmes »

Pendant ce temps, les agriculteurs conventionnels ont certes une année difficile, mais comme le remarque Jaochim Rukwied, président de l’association des agriculteurs allemands « Nous sommes heureux de pouvoir lutter aujourd’hui contre les maladies fongiques avec des pesticides. Si nous ne les avions pas eus, il n’y aurait pas de pommes de terre cette année. »

Commentaire de Seppi : « Si l’enjeu avait réellement été la récolte et l’utilisation durable des ressources, les agriculteurs bio auraient aussi pu utiliser des produits de protection des plantes modernes ; ils auraient toutefois perdu, pendant trois ans, leur certification biologique et ne pourraient pas appliquer pendant cette période un supplément de prix à leurs produits sur le marché. »

En année moyenne, « Une conversion à 100% au bio, comme le demandent le Parti Vert et les écologistes, signifierait […] une diminution des récoltes de 20 à 50%. Pour une année comme celle-ci, les agriculteurs allemands ne récolteraient probablement pas de vin, peu de pommes de terre et de concombres, et du blé de qualité médiocre. »

Sa conclusion tient en deux constats :
– « le bio est un mode de production de luxe pour des consommateurs de pays où les magasins débordent d’aliments. […] Renoncer de manière téméraire aux produits de protection des plantes ayant fait leurs preuves dans des essais de longue durée, c’est accepter le gaspillage des ressources et de la nourriture à grande échelle. »
C’est un mensonge éhonté que d’affirmer que le bio peut nourrir le monde. »

Mise à jour du 24 octobre 2016 :
Schillipaeppa, bloggeuse allemande, a également écrit « €cogaspillage » (traduction française par Seppi) critiquant les vues des Verts allemands sur l’agriculture. Elle prenait l’exemple de l’exploitation de Norwich Rüßen, député vert allemand et agriculteur bio. Celui-ci a répondu sur son blog et Schilipaeppa a écrit une réponse à la réponse. L’intégralité de l’échange a été traduit par Seppi. Le débat, ferme sur le fond et poli dans la forme, mérite qu’on s’y arrête.

Nous ne pouvons que souscrire et recommander de lire l’intégralité de l’article

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En complément, on peut recommander la lecture de « Traitements bio. Toxiques naturellement » dans Que Choisir de septembre 2016  (voir une copie sur un tweet de @AyuAndiRatih ou accéder à l’article (payant) sur le site de Que Choisir).
C’est une analyse équilibrée qui, tout en estimant que l’agriculture biologique a des avantages, souligne les risques environnementaux ou sanitaires des pesticides bios : roténone, ricin, spinosad, huile de neem, cuivre, et même « peu préoccupant ne veut pas dire inoffensif ».

Comme le résume Catherine Regnault-Roger, membre de l’Académie d’Agriculture, « Il n’y a pas d’agriculture sans traitement et il n’y a pas d’efficacité sans inconvénient »
Quant à ceux qui pensent faire du bio un moyen de lutte contre l’industrie, ils se trompent : « Loin de craindre le bio, les agro-industriels misent sur ce créneau porteur »