L’ANSES[1] vient de rendre public son avis relatif à « l’analyse de la pertinence en matière de nutrition de systèmes d’information nutritionnelle destinés au consommateur ». Le moins que l’on puisse dire est que l’ANSES n’est pas persuadée de cette pertinence.
Voir le communiqué de presse et l’avis intégral de l’ANSES.
Différents Systèmes d’Information Nutritionnelle (SIN) ont été testés. Pour l’ANSES, la pertinence des systèmes doit être jugée en fonction de leur « capacité à réduire l’incidence de pathologies dans l’ensemble de la population par l’intermédiaire de ses effets sur les choix alimentaires. » Rappelons que la modernisation de notre système de santé prévoit de proposer à l’échelle nationale un système unique d’étiquetage, utilisable sur la base du volontariat.
Les principales critiques de l’ANSES portent sur :
– Les SIN proposés « ne prennent pas en compte l’ensemble des variables pertinentes », principalement du fait qu’ils « intègrent sans distinction et de façon imprécise les besoins spécifiques des différents groupes de population »
– Les résultats, « tant sur des variables quantitatives (fréquences d’achat) que sur des variables qualitatives (compréhension de l’information et qualité nutritionnelle de l’achat) » sont contrastés : possibles effets contradictoires, « tels des effets de halo susceptibles de biaiser l’information perçue par le consommateur et d’induire un comportement inapproprié. »
– Pour beaucoup de nutriments, « les excès ou insuffisances d’apport ne concernent qu’un sous-groupe de la population. Seuls quelques nutriments (sucres, sodium, […], fibres) et l’énergie concernent une grande majorité des sous-groupes de population. »
Ce dernier point n’est qu’un exemple parmi d’autres du fait qu’au fond, il n’y a pas vraiment de bons ou de mauvais aliments, mais un bon ou un mauvais régime alimentaire.
Comme l’écrit la revue Process Alimentaire, dans « L’Anses plombe le projet d’étiquetage nutritionnel simplifié » : « Au fond, les experts estiment que la démarche de simplification incarnée par ces dispositifs s’oppose à la complexité fondamentale des relations entre l’alimentation et la santé. » Process Alimentaire montre la quasi-impasse dans laquelle se trouve le gouvernement, coincé entre d’une part sa volonté d’aboutir et la pression de Que Choisir, farouche partisan d’un étiquetage et d’autre part « le risque d’effets incertains voire même contre-productifs » d’un système trop simple.
Les décisions politiques simplistes, censées être compréhensibles par le grand public, flirtant quelquefois avec la démagogie, font souvent plus de mal que de bien. Ceci ne concerne malheureusement pas que l’étiquetage nutritionnel…
[1] Agence Nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail
Actualisation au 07 mars 2017 :
Dans « Nouvelle polémique autour de l’étiquetage nutritionnel« , Le Monde rend compte des réactions hostiles des partisans de l’étiquetage à ce rapport de l’ANSES.
Actualisation au 8 mars 2017:
La réponse de l’ANSES au Monde :