Dans son rapport annuel 2014, la Cour des comptes pointe des « anomalies graves » dans les contrôles des aliments. De nombreux titres de presse reprennent l’information sans distance. Qu’en est-il ?
Le rapport annuel 2014 de la Cour des Comptes porte, comme habituellement, sur tous les domaines de la chose publique.
Dans une partie de ce rapport intitulée « La sécurité sanitaire de l’alimentation : l’insuffisance des contrôles du ministère de l’agriculture« , la Cour des comptes pointe l’insuffisance des moyens de contrôle, « particulièrement sur les produits phytosanitaires utilisés dans la culture et sur les établissements de transformation de denrées animales ».
Elle constate également que 16% des anomalies moyennes ou majeures ont débouché sur davantage qu’un simple avertissement.
Des sages bien loin des réalités
Il est logique et légitime que la Cour des Comptes porte des jugements politiques sur les activités de la puissance publique, sur l’allocation des moyens humains et matériels pour exercer ces activités.
Mais, on peut douter de la compétence de la Cour des Comptes en matière de surveillance des résidus dans l’alimentation. Elle écrit par exemple : « Par ailleurs, les résultats des prélèvements montrent que les dépassements des limites maximales de résidus sont plutôt rares mais que la présence de produits phytopharmaceutiques est forte. Or les études récentes de l’Institut de veille sanitaire (INVS) ou de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) établissent un lien entre l’exposition aux produits phytosanitaires et certaines pathologies et s’inquiètent des effets dits « cocktail » et « faibles doses » ».
Or, il est clair pour tout le monde qu’il faut limiter l’exposition professionnelle aux pesticides, et, dans tels cas, il est légitime de s’interroger sur le lien avec certaines pathologies, même si la réponse n’est pas aussi simple que ce que certains marchands de peur claironnent…
Mais la LMR n’est pas une limite de sécurité des aliments : Des dépassements de LMR n’ont en général pas de conséquences sur la santé du consommateur. Quant à la présence de résidus en dessous de la LMR, elle n’a absolument aucune signification en matière de santé publique. Elle n’est que la conséquence de l’application d’un produit phytosanitaire dans des conditions normales. Pour plus de détails, voir : « Résidus et sécurité des aliments (1) » sur ForumPhyto.
Dans les médias
De nombreux médias centrent leur titre sur les contrôles sanitaires des aliments : « La Cour des comptes pointe «des anomalies graves» dans les contrôles des aliments » (Les Echos), « Alimentation : les contrôles sanitaires insuffisants, selon la Cour des comptes » (La Dépêche), Idem pour Le Parisien, La France Agricole, …
Générations Futures, ONG anti-pesticides par principe, concentre sa communication sur les résidus de pesticides.
Le coup de gueule de Daniel Sauvaitre
Dans ce contexte, il faut saluer le coup de gueule de Daniel Sauvaitre, arboriculteur, sur son blog. Il y écrit : « il est assez désespérant de mesurer l’ignorance des sages pour tout ce qui concerne la vie économique réelle.(…) Il y a belle lurette que les exigences des enseignes de la distribution en matière de sécurité sanitaire couplées avec la responsabilité pénale des dirigeants du privé garantissent et même au-delà le respect la législation en vigueur. »
Mais c’est surtout le traitement médiatique de l’affaire que D Sauvaitre pointe. En particulier l’interview d’Isabelle Saporta, présentée par Europe1 comme « spécialiste des questions de consommation et d’agro-industrie ». « Elle piaffe, ricane, approximationne, bêle et anone ce qu’elle a lu en diagonale du rapport sans trop chercher à comprendre. (…) Mais, même si ce n’est pas très déontologique et plutôt caricatural, tant que ça fait de l’audience, la chaine n’est pas regardante et continue de servir le même bouillon brouillon de la polémiste mal réchauffé au micro-onde. (…) il a fallu une nouvelle fois qu’elle s’en prenne aux pommes la mandarine. Tout juste selon elle s’il ne faudrait pas ne manger que les pépins après avoir jeté tout de qu’il y a autour. »
Bref, pour Daniel Sauvaitre, « Isabelle Saporta est bien une semeuse. Mais de bien autre chose que de bonnes graines ». Nous ne pouvons que lui donner raison.