Fin janvier 2015, l’EFSA (agence européenne de sécurité sanitaire) a émis un avis scientifique se résumant à « l’exposition au bisphénol A ne présente pas de risque pour la santé des consommateurs. » La France a déjà interdit le Bisphénol A et contraint les industriels à trouver des solutions alternatives plus coûteuses. Quelles perspectives ?
L’EFSA estime nécessaire de diminuer la dose journalière tolérable de BPA en la faisant passer de 50 microgrammes (µg) par kilo de poids corporel et par jour à 4 µg/kg/jour. Cependant, cette réduction ne change rien au fond de l’opinion de l’EFSA : « L’exposition par voie alimentaire ou par l’intermédiaire d’une combinaison d’autres sources est considérablement inférieure au niveau sans danger », y compris pour les bébés, les femmes enceintes et les enfants
La position de l’EFSA a entraîné une réponse mesurée de l’ANSES (Agence française de sécurité sanitaire) sous le titre « Bisphénol A : l’Efsa préconise une diminution de la dose journalière tolérée tout en considérant les niveaux actuels d’exposition sans risque pour la santé humaine » : « Dans son rapport final publié ce jour, l’Efsa conclut que le BPA ne présente pas de risque pour la santé des consommateurs aux niveaux actuels d’exposition (via l’alimentation, mais aussi les papiers thermiques ou les cosmétiques) mais préconise toutefois une diminution significative de la dose journalière tolérée du bisphénol A. L’Anses se félicite de la qualité des échanges, notamment concernant la prise en compte des incertitudes, et si des différences d’appréciation subsistent, l’Agence européenne et l’Agence française poursuivent leur collaboration, notamment dans un objectif d’harmonisation méthodologique. »
Du côté des médias, surtout ceux ayant un penchant environnementaliste, la cause est entendue : Emboîtant le pas à Ségolène Royal, ministre de l’écologie, ils accusent plus ou moins ouvertement l’EFSA d’avoir succombé à la pression « des lobbys ».
Par exemple :
« Bisphénol A : Ségolène Royal s’interroge sur le «poids des lobbys» » (Libération)
Le Point décide de donner la parole à Laurent Chevallier, docteur et militant environnementaliste, qui s’interroge « Bisphénol A : à quoi joue l’Agence européenne de sécurité des aliments ? »
Pour l’Usine Nouvelle, « L’Europe dédouane le Bisphénol A et réjouit les lobbies »
Générations Futures, ONG anti-pesticides par principe, crie au scandale…
En fait, quoiqu’on pense du fond du dossier, cette accusation, a priori sans fondement, a surtout pour but de masquer l’impasse dans laquelle s’est enfermé le gouvernement français en décidant, seul au monde, une interdiction du Bisphénol A.
Comme le bisphénol A a un rôle positif important dans les contenants alimentaires, cette interdiction a contraint les industriels à trouver rapidement des solutions de remplacement. Mais cela pose deux problèmes :
– L’interdiction uniquement en France complexifie l’industrie du contenant alimentaire et entraîne des surcoûts importants. Il faut donc s’attendre à une perte de compétitivité importante de l’industrie française
– Les alternatives au Bisphénol A sont maintenant accusées des mêmes maux, entraînant une insécurité règlementaire majeure pour les industriels.
Voir par exemple Actu-Environnement, le bulletin du CEA, le journal de la science,
Pour Albert Amgar, sur son blog lié à la revue Process alimentaire, il s’agit d’un nouvel épisode de la saga du Bisphénol A…
Une Saga ? ou un mauvais feuilleton ?
Addendum au 14 février 2015:
Sous le titre « Bisphénol A: vers une révision de la loi française ?« , la revue Process Alimentaire rend compte de la demande des fabricants français d’emballages de révision de la loi française, laquelle ne faisait que suspendre l’utilisation de Bisphénol A « jusqu’à ce que le Gouvernement, après avis de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, autorise la reprise de ces opérations. » Pour les fabricants : « La loi prévoit donc, elle-même, une reprise possible de la commercialisation des emballages avec BPA !«