L’émission Cash investigation du 02 février 2016 sur les pesticides s’est déroulé comme prévu : reportage à charge et plateau d’intervenants de même. Dans « Cash Investigation est en service commandé et ment par omission », nous avons montré la mécanique purement militante et unilatérale de l’émission.
Quelques compléments s’imposent.

Des omissions, mais pas que…

La plupart des affirmations avancées par Cash Investigation, que ce soit dans le reportage ou dans le débat qui a suivi étaient en partie vraies : les produits phytosanitaires ne sont pas innocents, et ils doivent être utilisés avec prudence. Bien d’autres moyens sont employés en priorité par les producteurs ôur protéger les cultures : rotations, bonnes pratiques agricoles, méthodes préventives, auxiliaires naturels et biocontrôle. Nous avons déjà souligné toutes les omissions de l’émission !

Cependant quelques énormités ont aussi été proférées. Par exemple, Elise Lucet a répété plusieurs fois que « 97% des aliments [contiendraient] des résidus de pesticides ». Cette phrase est tirée du site de l’EFSA qui affirme en fait : « Plus de 97 % des échantillons alimentaires évalués par l’Agence européenne de sécurité des aliments (EFSA) contiennent des concentrations de résidus de pesticides qui se situent dans les limites légales autorisées, dont presque 55 % sans aucune trace détectable de ces produits chimiques. »
Elise Lucet a donc raconté purement et simplement un bobard.
Autres exemples, les pesticides incriminés dans un incident dans une école en Gironde étaient en fait… bio. La surconsommation française est une idée reçue…  fausse : ramenée à la surface, la consommation française est au 9° rang européen.
Plusieurs autres affirmations reposaient essentiellement sur des impressions et/ou des témoignages individuels, probablement de bonne foi, mais sans aucune base scientifique réelle.
Une affirmation particulièrement contestable concerne le Chlorpyriphos accusé dans l’émission d’être au moins en partie responsable d’une augmentation des cas d’autisme. Or il y a bien une relation statistique aux USA entre l’évolution de l’emploi de cet insecticide et l’autisme. Mais cette relation est inverse. Les cas d’autisme augmentent alors que l’usage du chlorpyriphos baisse. Il faudrait prévenir Stephane Le Foll, qui s’est quasiment engagé pendant l’émission à le faire interdire. Il va avoir une épidémie d’autisme sur la conscience…

Une collaboration militante et liée au lobby bio

Nous avons déjà mentionné que ce Cash Investigation est le résultat d’une collaboration d’un an avec Générations Futures. S’appuyant sur leur approche, leurs méthodes d’analyse et leurs préjugés. Pas très étonnant que le contenu final soit étroitement militant.
De plus, Biocoop a publiquement affiché son soutien à l’émission dans un tweet.

Faut-il rappeler que l’émission a été diffusée sur France2, chaîne publique, payée par l’ensemble des citoyens ?

Les réactions à l’émission

La sphère environnementaliste et bio s’est bien sûr félicitée de l’émission et de son audience. Générations Futures a opportunément lancé un appel aux dons. Quoi de plus « naturel » que de vouloir récolter les fruits de son investissement… En toute indépendance ?
Le blog Même pas mal, abrité par Le Monde, a publié « Que faire après les révélations de « Cash Investigation » sur l’agriculture qui tue ? », un véritable mode d’emploi pour « limiter la quantité d’intrants chimiques dans votre alimentation et votre environnement » qui fera le bonheur de tous ceux qui ont été sensibles aux arguments d’Elise Lucet.
Tout ceci est d’une certaine façon habituel.

Ce qui l’est moins c’est l’ampleur des réactions dénonçant les méthodes et le parti-pris de l’émission dès le début de sa diffusion et même en partie avant celle-ci, sur la base de la diffusion des teasers. Réaction d’agriculteurs, mais aussi de citoyens soucieux d’une information plus équilibrée et plus respectueuse des faits.

Par exemple, Laurent Berthod a fait quelques rappels sur son blog.

L’article de ForumPhyto a été lu près de 3000 fois en 24h et a fait l’objet de nombreux tweets ou posts sur Facebook. Nous avons donc contribué à cette libération de la parole de ceux qui ne se satisfont pas d’une information à but anxiogène.

A noter également quelques réactions publiques le lendemain de l’émission.
La Coordination Rurale (syndicat agricole minoritaire) se demande pourquoi l’émission ne fait « aucune mention des efforts des agriculteurs ».
Pour Alerte Environnement, « l’agriculture basching démarre sur les chapeaux de roue en 2016 »
La Voix du Nord donnela parole à des producteurs qui dénoncent
Dans un communiqué de presse, l’UIPP (firmes phytosanitaires) souligne que « les études d’impact des phytos sur la santé contredisent les conclusions de l’émission » et que « l’exposition aux produits phytos n’a jamais été aussi faible, et ce grâce aux démarches de progrès de l’ensemble de la filière et des agriculteurs ».

L’évangile selon Sainte Lucet est fort trompeuse…