L’annonce le 11 janvier 2018 par Stéphane Travert de l’annonce « d’un plan de sortie des pesticides » au prochain Salon de l’Agriculture fait partie de la tactique maintenant éprouvée du gouvernement : « préparer les esprits » (en bon langage politicien de l’ancien monde) et espérer ainsi faciliter l’acceptation finale de l’amère potion. A quoi faut-il donc s’attendre ?
Quelques médias rendent compte de cette pré-annonce.
Dans « Le plan de sortie des phytosanitaire sera annoncé au Salon de l’Agriculture 2018 », Environnement Magazine rend compte de l’annonce par Stéphane Travert de ce plan qui « devrait rendre possible une sortie de l’utilisation des pesticides en trois ans, selon les déclarations du Président français »
Commentaire de Guy Waksman dans la gazette de l’AFIA du 18 janvier : Ce « Phytexit » est « aussi catastrophique – au sens où c’est du temps et de l’énergie dépensés en vain – pour l’agriculture française que le Brexit pour le Royaume-Uni et pour l’Europe »
Les Echos (dans « Pesticides : le plan de travail du gouvernement ») et Ouest France (dans « Un avant-goût du plan de réduction des pesticides »), listent les « quatre priorités » du gouvernement :
– La baisse rapide de l’usage des pesticides les plus préoccupants pour la santé et l’environnement.
– Le renforcement de la recherche sur leur impact sur la santé.
– La recherche d’alternatives et la mise en œuvre de ces solutions par les agriculteurs.
– Le renforcement d’Ecophyto 2 et l’amélioration de sa gouvernance.
Ouest France détaille un peu plus les « mesures techniques » qui manieront « la carotte et le bâton ».
Qu’attendre de ce plan ?
Notons tout d’abord que l’intitulé du plan (« sortir des pesticides en trois ans ») est certes ambitieux (et stupide). Mais les priorités annoncées ne sont pas aussi « ambitieuses ». Elles ne sont pas des nouveautés. Des formulations proches ou identiques pourraient de plus faire l’unanimité.
Mais, malgré ce manque d’ambition, ce plan est dangereux pour plusieurs raisons :
– En laissant croire que l’arsenal administratif sur les pesticides serait insuffisant, il alimente le commerce des marchands de peur. Notons par exemple que les « pesticides les plus préoccupants pour la santé et l’environnement » ont déjà été retirés du marché au niveau européen.
– Il entretient l’illusion d’une agriculture sans aucun pesticide. Dans l’état actuel des connaissances, cette agriculture est impossible sauf à accepter un recul de la production, une diminution de la sécurité sanitaire des aliments, une augmentation du prix de l’alimentation, un recours massif aux importations. Sans compter la nécessité de recourir au travail des enfants pour ramasser les doryphores comme au bon vieux temps…
– Il entretient l’illusion d’une agriculture biologique sans pesticides. On doit noter que le gouvernement, parmi les mesures censées « sortir des pesticides » proposerait des mesures supplémentaires pour favoriser le bio. Un bio sans bouillie bordelaise dommageable pour les sols, ni huile de neem, perturbateur endocrinien reconnu ? chiche !
– Et surtout, il entretient la confusion entre « réduction des risques » et « réduction des volumes ». Confusion sur laquelle est basée la politique des pouvoirs publics depuis le Grenelle de l’Environnement.
La réduction d’utilisation des pesticides en volume est une perspective illusoire et dangereuse. L’amélioration de la balance bénéfices/risques, c’est-à-dire la réduction des risques et l’amélioration de l’efficacité, est la seule perspective concrète digne d’intérêt. Elle est mise en œuvre par l’ensemble des filières agricoles (agriculteurs, firmes phytos, machinisme, conseils, distributeurs privés et coopératifs) depuis des dizaines d’années. C’est une tâche longue et complexe : mesures agronomiques et préventives, méthodes mécaniques, biocontrôle, aide à la décision, qualité de la pulvérisation, profil des substances, formulation, méthodes d’application, etc. Mais les résultats sont là. Voir « Impact des pesticides : pourquoi et comment diminue-t-il ? »